Contre-visite médicale patronale

La contre-visite médicale patronale

L’employeur qui verse une indemnisation complémentaire en cas d’arrêt de travail peut demander une contre-visite médicale, ou visite de contrôle, pour vérifier le bien-fondé de l’arrêt de travail du salarié.

Il ne faut pas confondre cette contre-visite médicale patronale avec le contrôle médical que la sécurité sociale peut mettre en œuvre de sa propre initiative.

Code du travail : Art. L. 1226-1

Conditions générales à la contre-visite

La convention collective de branche peut fixer des modalités particulières d’organisation de la contre-visite, l’employeur doit alors s’y conformer. Dans le cas contraire, la contre-visite est irrégulière et l’employeur ne peut alors pas cesser de verser les indemnités complémentaires.

Cass. soc. 14-01-1998, n° 95-44897

À défaut de procédure conventionnelle, les juges ont dégagé un certain nombre de grands principes.

Être une contrepartie au maintien de salaire

La contre-visite peut se faire en cas d’arrêt de travail pour maladie ou en cas d’arrêt de travail consécutif à un accident du travail.

Mais la contre-visite n’est possible que si l’employeur doit effectuer un maintien de salaire légal ou conventionnel au salarié.

Il est donc impossible d’y recourir pendant le délai de carence précédant l’indemnisation complémentaire (délai de carence de 7 jours prévu par le code du travail en cas de maladie non professionnelle) ou s’il n’y a pas de maintien de salaire.

Choix du médecin-contrôleur

L’employeur est libre de choisir le médecin contrôleur. Ainsi, le salarié ne peut pas imposer un médecin de son choix, ni exiger la présence de son médecin traitant, sauf dispositions conventionnelles le prévoyant expressément.

Cependant, une convention collective peut prévoir que le contrôle sera exercé par le médecin choisi par l’employeur ou, à la demande du salarié, par un praticien choisi parmi ceux figurant sur la liste des experts près des tribunaux.

Si le salarié use de cette possibilité et que le médecin-contrôleur mandaté par l’employeur n’a pas cette qualité, le refus de contrôle par le salarié ne sera pas une faute et l’employeur devra continuer à verser les indemnités conventionnelles.

Heure de la contre-visite

L’employeur n’a pas à prévenir le salarié de la contre-visite sauf dispositions conventionnelles le prévoyant. Cependant, il doit respecter les heures de sortie autorisée indiquées sur l’avis d’arrêt de travail et prévoir donc la contre-visite en dehors de ces périodes,

En effet, en cas d’arrêt de travail, les heures de sortie autorisées sont définies par le médecin traitant, ce dernier a le choix entre :

  • interdire les sorties
  • les autoriser, dans ce cas, le salarié doit rester présent à son domicile de 9 h à 11 h et de 14 h à 16 h, sauf en cas de soins ou d’examens médicaux
  • ou autoriser les sorties libres en indiquant sur l’arrêt de travail les éléments d’ordre médical le justifiant.
Code Séc. soc. art. R. 323-11-1

Lieu de la contre-visite

Normalement, la contre-visite s’effectue au domicile du salarié. Cependant, si ce dernier a été autorisé par sa caisse de sécurité sociale à séjourner hors de son domicile, il doit en informer son employeur et lui communiquer son adresse de résidence, et ce même en cas d’arrêt de travail sorties libres.

Qualité du médecin

Le médecin contrôleur doit faire savoir au salarié contrôlé qu’il agit pour le compte de l’employeur et il doit lui prouver sa qualité de docteur en médecine.

A défaut, le refus du salarié de recevoir le médecin ne peut pas s’analyser en un refus de se soumettre au contrôle médical.

Cass. soc. du 11-12-86, n° 84-41.672

Absence du salarié lors de la visite du médecin-contrôleur

Absence injustifiée

Si le salarié absent de son domicile n’est pas en mesure de justifier des motifs de son absence, il perd le bénéfice des indemnités complémentaires.

Absence justifiée

Si l’absence du salarié à son domicile est justifiée, l’employeur ne peut pas suspendre le versement des indemnités complémentaires, il en est par exemple ainsi :

  • lorsque le salarié se trouvait en consultation chez un médecin pour une raison médicale liée à l’arrêt prescrit Cass. soc., 14-12-2011, n° 10-16.043
  • lorsque la visite du médecin contrôleur a lieu pendant les heures de sorties autorisées Cass. soc., 26-09-2012, n° 11-18.937

Contre-visite en cas d’arrêt de travail avec sorties libres

Lorsque le salarié est placé en arrêt maladie selon un certificat médical portant la mention « sortie libre », la CPAM ne peut pas supprimer les indemnités journalières en cas d’absence du salarié lors du contrôle.

Il en va de même pour l’employeur qui ne peut pas cesser le paiement des indemnités complémentaires si le salarié est absent lors du contrôle à la condition que l’employeur a été informé par le salarié des horaires et adresse où les contre-visites peuvent être effectuées.

Cass. soc., 04-02-2009, n° 07-43.430

Preuve de l’absence du salarié lors du passage du médecin contrôleur

La preuve de l’absence du salarié peut être l’indication de l’absence sur le compte rendu de résultat de cette contre-visite indiquant la date et l’heure du passage du médecin contrôleur.

Obligation de se soumettre au contrôle

Le salarié doit se soumettre à la contre-visite organisée par l’employeur dès lors que les conditions requises sont remplies.

Ainsi, le refus du salarié de se soumettre à la contre-visite est un manquement à son obligation, manquement qui le prive du bénéfice des indemnités.

Exemple

Le fait de n’accepter la contre-visite qu’en présence du médecin traitant, alors qu’une telle exigence n’est pas prévue par la convention collective applicable, est assimilé à un refus.

Refus justifiés

Le refus du salarié de subir la contre-visite médicale est légitime lorsque :

  • le médecin ne décline pas sa qualité de docteur en médecine et celle de mandataire de l’employeur
  • l’inaptitude du salarié a déjà été reconnue par le médecin du travail
  • l’état de santé du salarié rend extrêmement douloureux l’examen clinique permettant d’apprécier la gravité de l’affection

Preuve de l’impossibilité d’effectuer la contre-visite

C’est à l’employeur qui a pris l’initiative du contrôle d’établir que l’impossibilité du contrôle est due au salarié.

Cass. soc., 30-06-1988, n° 86-41.898

Décisions du médecin-contrôleur et conséquences

La contre-visite peut porter sur l’opportunité de l’arrêt de travail, sa durée et la vérification du respect des heures de sortie.

Le salarié doit se soumettre à la décision du médecin qui a effectué la contre-visite. Ainsi, il doit reprendre le travail à la date fixée par le médecin-contrôleur, sous peine de perdre le bénéfice des indemnités complémentaires.

Maintien des indemnités journalières complémentaires

Si le médecin contrôleur confirme la prescription du médecin traitant, l’employeur continue de maintenir le salaire et il attend la reprise de travail du salarié. Il en est de même si le salarié est absent pour une raison justifiée.

Suspension du paiement des indemnités complémentaires

L’employeur peut cesser de verser le maintien de salaire à sa charge si la contre-visite conclut à un arrêt de travail injustifié.

Ainsi, la cessation de paiement est possible si :

  • le médecin considère que l’état de santé du salarié lui permet de reprendre le travail et que le salarié refuse
  • le salarié refuse de recevoir le médecin alors que le médecin a valablement justifié de sa qualité de docteur en médecine
  • le salarié est absent de chez lui en dehors des heures de sortie autorisée sans motif légitime

La suppression de ces indemnités ne peut prendre effet que pour la période postérieure au contrôle et ne remet pas en cause les indemnités versées avant le contrôle.

Cass. soc. 15-10-1987, n° 85-40555

Contestation par le salarié de la décision du médecin-contrôleur

Si le salarié conteste les résultats de la contre-visite, il peut solliciter une autre contre-visite ou demander une expertise judiciaire en saisissant le juge des référés afin désigner un médecin-expert, lorsque les conclusions de ce dernier confirment la nécessité de l’arrêt de travail, l’employeur doit continuer le versement des indemnités complémentaires.

Nouvel arrêt de travail

Après une contre-visite ayant conclu à un avis de reprise, une salariée peut consulter à nouveau son médecin traitant et ce dernier peut prolonger l’arrêt de travail, la salariée est ainsi rétablie dans son droit à indemnités complémentaires.

Pour contester ce droit, l’employeur doit faire procéder à une nouvelle contre-visite.

Cass. soc., 05-03-1997, n° 94-44.902

Pas d’autre sanction possible

La suppression du maintien de salaire constitue la seule sanction possible du contrôle. L’employeur ne peut pas prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre du salarié tel un avertissement, un blâme ou un licenciement. cass. soc. 27-06-2000, n° 98-40952

Conséquences de la contre-visite patronale pour la sécurité sociale

Transmission du rapport à la CPAM

Lorsque la contre-visite patronale conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail, ou s’il a été impossible de procéder à l’examen du salarié, le médecin contrôleur transmet son rapport au service médical du contrôle médical de la caisse de sécurité sociale.

Au vu de ce rapport, le médecin-conseil de l’assurance-maladie peut demander à la caisse :

  • soit procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré, ce qui est obligatoire si le rapport fait état de l’impossibilité d’examiner le salarié
  • de suspendre le versement des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS)

Dans ce dernier cas, une fois informé, le salarié dispose d’un délai de 10 jours francs à compter de la réception de l’information de suspension des IJSS, pour demander à la caisse de sécurité sociale dont il relève, un examen de sa situation par le médecin-conseil. Ce dernier doit se prononcer dans un délai de 4 jours francs à compter de la saisine du salarié.

Résultat de l’examen

Si le médecin contrôleur estime que l’arrêt de travail pour maladie est justifié, l’employeur doit continuer à verser les indemnités complémentaires.

A l’inverse, si après examen de l’assuré, le médecin-conseil conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail, il en informe le salarié et lui communique une date de reprise du travail. Il informe également les services administratifs de la caisse, le médecin traitant et l’employeur. L’employeur est alors en droit de ne pas verser les indemnités journalières complémentaires.

De plus, un assuré ayant fait l’objet d’une décision de suspension des IJSS qui se voit prescrire un arrêt de travail dans les 10 jours suivants n’a plus automatiquement droit aux IJSS. Leur versement dépend d’un avis du service du contrôle médical qui est rendu dans un délai de 4 jours à compter de la date de réception de l’arrêt de travail.

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